Silo, de Hugh Howey

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Silo

Résumé :

Dans un futur post-apocalyptique indéterminé, une communauté d’hommes et de femmes a organisé sa survie dans un silo souterrain géant. Du monde extérieur, devenu hostile, personne ne sait rien, sinon que l’atmosphère y est désormais irrespirable. Les images de mauvaise qualité relayées par d’antiques caméras, montrant un paysage de ruines et de dévastation balayé de vents violents et de noirs nuages, ne semblent laisser aucune place à l’illusion. Pourtant, certains continuent d’espérer. Ces individus, dont l’optimisme pourrait s’avérer contagieux, représentent un danger potentiel. Leur punition est simple. Ils se voient accorder cela même à quoi ils aspirent : sortir.

J’ai lu les 3 volumes de Silo en deux semaines environ. C’est dire si les plus de 1500 pages des trois livres s’enchaînent vite et si l’on est rapidement plongé dans l’histoire. Hugh Howey nous plonge directement dans l’ambiance non pas en nous abreuvant d’informations sur le Silo et cet univers inquiétant, mais par une petite histoire, celle d’un homme, Holston, le shérif du silo qui pleure sa femme.

C’est par son regard que l’on apprend ce qui se passe dans le silo, un monde où les naissances sont strictement contrôlées et gérées par une lotterie, un monde où il n’y a pas d’histoire juste des mythes et des légendes sur ce qu’aurait été le passé, un monde où la vie se résume au silo et où les mots “extérieur” ou “sortir” sont bannis sous peine de mort en étant expulsé du silo avec pour mission de nettoyer l’unique écran montrant un monde extérieur stérile avant de mourir.

Silo : un monde en vase clos

Dans ce monde aux libertés limitées et où chacun, des fermiers aux porteurs en passant par les mécanos des niveaux inférieurs, doivent assurer leur mission coûte que coûte sans autre assurance que de vivre un autre jour, les tensions sont toujours palpables et il suffit d’un déclic, d’une forte tête pour que le frêle équilibre de ce monde vivant en autarcie ne soit rompu.

C’est ce qui arrive quand Jahns la maire du silo décide de faire d’une machiniste, Juliette dite Jules, le nouveau shérif. Une décision qui ne plait pas vraiment au responsable du niveau 34, celui de l’informatique, qui a l’air d’en savoir plus que les autres et surtout de vouloir décider pour tout le monde.

Ce qui doit arriver inéluctablement arrive donc, Jules est expulsée du silo pour faire un nettoyage et une révolution commence au départ des niveaux les plus inférieurs. Une révolution qui inévitablement est un échec, mais c’est à l’extérieur que l’inévitable se produit puisque Jules découvre un autre silo où elle parvient à rentrer et y découvre un semblant de vie, ou de survie.

Dans ce premier volume on ressent bien la manière dont il a été écrit. Des histoires courtes publiées directement par la biais d’Amazon et auxquelles Hugh Howey a ajouté des suites alors que la demande lui en était faite par ses lecteurs. Le rythme est donc rapide et l’histoire ne cesse d’avancer avec une continuité toujours claire entre les 5 premiers livres. On est donc bien accroché au livre et à ses personnages et l’ambiance mystérieuse et pesante est toujours bien présente ce qui pousse à continuer la lecture, voire même à l’accélérer.

SiloOrigines

Dans le 2e volume intitulé Silo Origines en France, mais originellement appelé Shift, fait référence aux factions que mènent les équipes successives du Silo 1 en se concentrant particulièrement sur Troy. En parallèle, Hugh Howey nous montre comment les silos ont été créés par les yeux de Donald Keene, un élu de la Chambre des Représentants des USA. Ce que l’on apprend au fil des pages est sidérant, une caste, un clan, qu’on ne voit pas et qui n’est pas nommé mais dont on voit l’une des têtes pensantes par les yeux de Donald, décide de rayer l’humanité de la carte et de n’en sauver que quelques milliers.

Silo : une arche de Nöé des temps modernes

Les silos seraient donc une sorte d’arche de Noé moderne. Seulement comme on peut le voir lors d’une autre faction présentée dans le volume, ces hommes et ces femmes qui ont été sauvés ne l’ont peut-être pas été réellement. Ils restent en effet à la merci des responsables du silo 1, qui peuvent décider de s’en débarrasser si leurs comportements ne correspondent pas à leurs attentes, s’ils deviennent trop curieux sur leur passé par exemple. Dans ce cas là, ils ne seront rien d’autres que des dommages collatéraux, une marge d’erreur dans un programme qui dépasse tous les individus.

On arrive ici à la description de l’oppression dans la plus pure forme qui soit. Celle du déni des individus pour ne plus voir qu’une existence, celle de l’humanité. Le problème c’est que cette humanité devient complètement déshumanisée, que ce soit par le comportement des responsables du silo 1 qui décident de la vie ou de la mort des habitants des autres silos, ou que ce soit par la révolte à laquelle on assiste à la fin du volume dans le silo 17. Face à une vie qui n’en est pas une, qui ne vaut pas la peine d’être vécue, les hommes retombent dans leurs instincts primaires comme des animaux.

Silo origines ne pose finalement qu’une seule question, qu’est ce qui fait de l’homme un homme, en quoi vaut-il mieux qu’un simple animal se battant pour sa survie.

SiloGenerations

Arrive enfin le 3e volume de l’histoire, Silo Générations, ou Dust soit poussière en anglais. Difficile de trouver plus mauvaise traduction, d’autant plus que les différents fils narratifs se déroulent désormais au même instant. Tous les personnages qu’Hugh Howey nous a présenté et qui sont encore vivants vont donc se croiser et permettre l’accomplissement de la renaissance de l’humanité. Pas celle prévue cependant par les organisateurs de ce plan machiavélique. Après des années d’oppression le système ne tient plus que sur la peur des deux côtés.

C’est d’ailleurs là l’une des plus belles réussites d’Hugh Howey dans ce volume, montrer que la liberté, quand elle n’est qu’un mythe peut faire peur. Il peut être plus facile de confier son destin à d’autres, de donner sa responsabilité à ceux prêts à l’exercer pour ne pas avoir à penser ou à prendre de décisions difficiles. Finalement une belle représentation de l’allégorie de la caverne de Platon. Ne pas faire confiance à une élite mais exercer soi-même le pouvoir et redonner un sens au mot démocratie.

Décidément Silo semble bien être plus qu’une simple histoire de science-fiction.

Silo, d’Hugh Hower aux édition Actes Sud (2013) 560 pages

Silo Origines, d’Hugh Howey aux éditions Actes Sud (2014) 576 pages

Silo Générations, d’Hugh Howey aux éditions Actes Sud (2014) 432 pages

5 Commentaires

    • C’est vrai que les trois ne fonctionnent pas de la même façon. Le premier fonctionne sur la découverte, le second sur l’envie de comprendre le pourquoi du comment et le 3e sur l’attente d’une conclusion. Côté intensité ça a tendance à redescendre, surtout entre le 2 et le 3, mais ça m’a plu jusqu’à la fin 🙂